DES NOUVELLES D’ICI
Entretien avec Maëlle Dequiedt

FWD: CHANTAL

Comment as-tu eu l’idée de travailler sur un solo autour du cinéma de Chantal Akerman ?

Maëlle Dequiedt : Par un concours de circonstance : il se trouve que j’ai emménagé à Ménilmontant au moment où je suis tombée amoureuse de son cinéma. Un jour, en me promenant dans le quartier, je suis tombée sur une allée qui portait son nom. En faisant des recherches sur Internet, j’ai découvert que le dernier appartement où elle avait vécu était situé au bout de ma rue… Je me suis fascinée par cet appartement et j’ai commencé à chercher les pièces manquantes du puzzle.

C’est un projet personnel qui parle de cinéma mais qui parle aussi de ta vie…

Maëlle Dequiedt : Il se trouve que Chantal est aussi le prénom de ma mère et c’est en pensant à cette coïncidence que j’ai commencé à écrire un texte. Je voulais que la présence de Chantal Akerman soit comme un fantôme qui me guide pour tracer un chemin dont je connaissais le point de départ mais j’ignorais le point d’arrivée.

Quelle place occupe la réalisatrice dans le spectacle ?

Maëlle Dequiedt : Difficile à dire car le processus de création est en cours. Je tisse des liens entre l’univers de ses films et la vie. Je m’intéresse moins aux histoires qu’aux impressions, aux sensations, aux atmosphères de ce cinéma qui a su être extrêmement radical. C’est un cinéma qui donne du courage.

Peux-tu nous parler du texte ?

Maëlle Dequiedt : Au théâtre, je n’ai jamais écrit de texte. Mais bizarrement, j’avais une idée assez précise de ce que devait être ici le texte : un texte qui coulerait comme un fleuve en emportant tout sans jamais buter sur les mots. De tels textes, on en trouve souvent dans les films de Chantal Akerman. Ce sont souvent des lettres lues par des femme qui ont tout quitté pour suivre leur mari dans des vies où elles s’ennuient à mourir, des vies qui ne leur appartiennent pas. C’est comme si les mots avaient le pouvoir de liquider tout ça, de détruire l’ennui du quotidien.

Le spectacle se présente comme un solo pour actrice et VHS. Qu’est-ce que ça veut dire ?

Maëlle Dequiedt : C’est un spectacle avec presque rien : un matelas, un ventilateur, du café… La fiction que je me raconte est très simple : par une chaude journée d’été, une de ses journées où l’on croit que l’on va sortir mais non on reste chez soi, une femme passe de son lit à la cuisine et de la cuisine à son lit et elle se met à divaguer… C’est une performance destinée à être jouée n’importe où, dans les théâtres ou en dehors des théâtres. Je ne voulais ni régisseur ni lumières – je voulais jouer avec la lumière du jour, les bruits de la rue… Je voulais une forme dans laquelle rien ne fait obstacle à la rencontre avec le public.

Propos recueillis par Simon Hatab